Billet de Monseigneur Alexandre Joly

 

Un renouvellement intérieur l’Esprit Saint

Après le carême et le temps pascal, nous voilà revenus dans le temps ordinaire. Ordinaire sonne banal, sans intérêt. Nous cherchons plutôt de l’extraordinaire, de l’exceptionnel, de la nouveauté. Serions-nous entrés dans un temps banal, dans l’attente impatiente d’autres temps plus inattendus ?

Il y a quelques semaines, nous célébrions le grand événement de la Pentecôte, la fête de l’Eglise. Il y a deux mille ans, Jésus a accompli sa promesse en comblant ses apôtres de l’Esprit Saint afin qu’ils puissent remplir leur mission et annoncer la Bonne Nouvelle. L’Esprit n’est pas banal et ne suscite pas la banalité. Si l’Esprit nous a été donné pour vivre le temps ordinaire, cela implique que ce temps ordinaire ne soit pas banal. Plutôt que de comprendre le qualificatif « ordinaire » en opposition à « extraordinaire », il convient de réaliser que le temps est ordinaire en ce qu’il est ordonné au temps de Dieu. Étant ordonné à Dieu, le temps prend une toute autre saveur. Il est habité par Dieu, animé par Dieu, transformé par Dieu. Année après année, nous vivons les mystères du Christ et par-là sommes associés à sa vie, à son être, à sa victoire sur le mal et sur la mort. Petit à petit, le Christ nous transforme pour que nous vivions de lui, que nous vivions de sa vie.

Le temps ordinaire est extraordinaire parce qu’il est habité par Dieu, parce que nous célébrons chaque jour les mystères de Celui qui nous entraîne vers le Père dans la force et la communion de l’Esprit. Si le temps vit au rythme du temps de Dieu, il n’est plus une succession de jours et de nuits mais un chemin qui nous mène jusqu’à l’intime du mystère de Dieu.

Le temps pascal et la fête de la Pentecôte ne sont plus seulement un événement du passé mais le moteur du temps ordinaire, le moteur de notre existence. L’Esprit nous est donné pour habiter le temps, pour faire du temps qui passe un chemin qui élève, qui transforme, qui sanctifie.

En célébrant la fête de la Pentecôte, nous avons été invités au Cénacle, avec les Apôtres, afin de recevoir l’Esprit qui sanctifie. De nombreux adultes ont été confirmés, ont reçu la marque du Saint-Esprit, ont été comblés à jamais par l’Esprit qui est le Don de Dieu, le don par excellence. L’Esprit est venu pénétrer leur vie pour les animer de l’intérieur, pour leur donner la force d’avancer, pour leur donner la joie, pour conformer leur espérance et assurer leur foi, pour les embraser de charité.

La vie chrétienne est transformée de l’intérieur par le Don de Dieu qui est l’Esprit, comme les confirmés ont été transformés par le sacrement de confirmation. De même que le temps ordinaire est ordonné au temps de Dieu, notre vie est rythmée par la vie de Dieu, par la grâce et la force de l’Esprit. Notre vie n’est pas la recherche de la nouveauté pour la nouveauté, mais le renouvellement intérieur par l’Esprit Saint. L’Esprit nous transforme afin que nous épanouissions pleinement les dons reçus et que nous puissions collaborer à l’œuvre de Dieu.

Nous sommes appelés à faire de notre vie une réalité extraordinaire, non pas parce que nous aurions accompli des exploits, mais parce que notre vie est habitée par Dieu, conduite par Dieu, éclairée par Dieu. Se laisser habiter par Dieu nécessite une proximité avec le Christ, notamment en célébrant ses mystères tout au long de l’année. Cela se traduit par une vie accordée à l’Evangile et aux commandements de Dieu. Une vie conduite par Dieu est aussi une vie fraternelle, une vie en Eglise, où nous réalisons que nous ne sommes pas seuls : nous sommes membres du même corps, celui du Christ, membres d’une même famille, celle de Dieu.

Lorsque notre vie est habitée par Dieu et conduite par l’Esprit, lorsqu’elle est ancrée dans les mystères du Christ que nous célébrons tout au long de l’année, alors cette vie est profondément transformée par l’extraordinaire de Dieu. Le temps ordinaire peut refléter l’extraordinaire de l’amour de Dieu à travers des disciples missionnaires qui se laissent conduire par l’Esprit Saint.

 

Alexandre Joly

Evêque de Troyes