N’ayons pas peur de l’avenir

Une Église en mouvement

Lettre aux Diocésains de l’Aube

Voilà bien des années que notre Eglise diocésaine est en chemin pour faire face à sa mission, qui est une belle mission, d’annoncer Jésus Christ aux hommes de ce monde. Au fil du temps son visage s’est transformé. De plus en plus elle est devenue l’affaire de tous les baptisés. De plus en plus les chrétiens prennent conscience de leur vocation et de leur responsabilité de la faire vivre afin qu’à travers elle la présence aimante du Christ se fasse toujours davantage visible, réconfortante, dynamisante pour le monde. Ce visage comporte aussi, nous le savons bien, des zones d’ombre: l’accroissement de l’indifférence à l’égard du message dont l’Eglise veut être porteuse, l’avènement de générations qui n’ont plus aucune connaissance du Christ, et aussi la diminution du nombre des prêtres. Ceci ne peut que nous laisser sans repos, car l’annonce de l’Evangile, la proposition de la foi et le témoignage de l’amour de Dieu en Jésus Christ sont la raison d’être de l’Eglise que nous voulons être ici même, dans notre département. « Le peuple saint est organisé pour que les tâches missionnaires soient accomplies et que se construise ainsi le Corps du Christ» (Ephésiens 4, 12).

Ensemble responsables

Nombreux sont donc déjà dans notre diocèse les chrétiens conscients de l’urgence de leur engagement pour que l’Eglise vive et remplisse sa mission. Notre Eglise de l’Aube est une Eglise où prêtres et laïcs sont ensemble responsables de la vie ecclésiale et de l’avancée de l’Evangile. Mais la question qui se pose à nous constamment est: Comment continuer à servir cette vie ecclésiale et cette avancée de l’Evangile au temps où nous sommes et dans les conditions où nous serons demain ?

 

Des nouvelles pages à écrire

Pour écrire les nouvelles pages de l’histoire de notre Eglise qui sont à écrire, il faut du souffle, de l’audace, de l’inventivité, des moyens. J’ai pu voir, à l’occasion des visites pastorales, la maturité acquise par un certain nombre de laïcs tout donnés dans l’animation de la communauté, au sein des équipes pastorales, dans des missions de permanents ou dans des engagements plus ponctuels. Ceci me remplit d’espérance: le témoignage de ces hommes et de ces femmes est le signe qu’il y a du souffle dans nos communautés, qu’on n’appelle pas en vain les baptisés, que le courage ne manque pas au fond des cœurs et que beaucoup prennent conscience qu’au titre de leur baptême ils ont vocation à être des serviteurs de l’Evangile pour le bonheur de leurs frères et non pas de purs consommateurs ou des suppléants du prêtre.

Une conversion permanente

Mais nous devons avoir conscience aussi que nous avons toujours besoin de nous convertir, d’accepter de nous déposséder de nos désirs et de nos représentations par rapport à l’Eglise, de quitter nos vieilles habitudes et de recevoir notre Eglise de l’Esprit Saint qui vient toujours « faire toutes choses nouvelles» (Apocalypse 21, 5). Si nous, évêque, prêtres, diacres, consacrés, baptisés, ne faisons pas l’effort permanent de nous convertir, chacun pour sa part, au Christ et à sa mission dans le monde d’aujourd’hui, si nous ne nous rendons pas disponibles à l’Esprit Saint et à ce qu’il nous inspire dans l’écoute des appels du monde, il nous sera difficile d’écrire une nouvelle page de l’histoire de notre Eglise diocésaine.

 

I. DE QUOI S’AGIT-IL?

C’est la responsabilité de l’évêque avec tous ceux qui sont engagés dans la vie de l’Église de «penser l’avenir». Ils doivent veiller à ce que l’Église puisse continuer à vivre et à remplir sa mission, que les chrétiens continuent à se rassembler pour écouter la Parole de Dieu et célébrer le Christ mort et ressuscité, qu’ils soient toujours témoins de son amour dans le monde.

C’est pour « penser l’avenir » de notre Église diocésaine, que j’ai demandé aussi bien aux doyens de la partie rurale du département, qu’aux prêtres de l’agglomération troyenne, de réfléchir aux moyens pastoraux que nous pourrions nous donner pour assumer cet avenir et à de nouvelles manières de travailler ensemble. L’option présentée ci-dessous est issue de cette réflexion.

A. Nos moyens pastoraux

Les « ensembles paroissiaux »

De nouveaux espaces de coordination

  1. Les « ensembles paroissiaux »

Ils sont et seront de plus en plus la base de notre vie ecclésiale. Ils ont pour mission d’assurer dans la proximité le service de la foi, du rassemblement et du témoignage des chrétiens.

Au sein de cet espace ecclésial, des chrétiens, délégués par leurs frères et envoyés par l’évêque comme membres d’une « équipe pastorale », d’autres dans le cadre d’une « équipe d’animation paroissiale », acceptent d’assumer des tâches de coordination, d’animation, d’appel pour que, dans cet espace et au plus près de tous, la foi chrétienne soit vécue et transmise. Cette «équipe» est toujours en lien avec un «prêtre» qui en est le «premier responsable». Elle doit se donner des objectifs, des méthodes de travail, des priorités en fonction de la situation qui lui est propre, car travailler dans la proximité veut dire aller à la rencontre des besoins humains et spirituels des hommes qui sont là à notre porte et non pas mettre en œuvre des principes pensés en chambre.

Faire choix de l’ «ensemble paroissial» comme base de notre vie ecclésiale ne constitue pas une nouveauté mais au contraire la confirmation d’un choix pastoral qui a été fait déjà dans notre diocèse. En conséquence de cela il est clair :

– que là où cette orientation n’a pas encore été prise, il est important qu’elle le soit.

– qu’étant donné la diminution du nombre des prêtres leur proximité ne pourra plus être ce qu’elle a été en d’autre temps, et qu’il reviendra de plus en plus aux laïcs présents sur le terrain d’être les animateurs de la communauté.

– qu’il faut veiller à ce que ces ensembles paroissiaux soient viables, répondent aux besoins de ceux qui y habitent, en assurant la proximité du « vivre, croire, célébrer, annoncer » pour tous.

 

  1. De nouveaux espaces de coordination

La coordination entre les ensembles parois­siaux se fait pour le moment dans les «doyennés». Après avoir pris en compte la réflexion et les propositions des doyens ruraux et de ceux de la ville, j’ai fait le choix pour l’avenir de « nouveaux espaces de coordination », plus vastes que les doyennés actuels, puisque

– pour la partie rurale du diocèse, nous passerons de 7 doyennés à 4 nouveaux espaces;

– pour l’agglomération troyenne, nous passerons de 3 doyennés à un seul espace.

Etant donné la grande diversité des différentes parties de notre diocèse, ces nouveaux espaces devront nécessairement se déployer selon des dynamiques propres à chacun d’eux. Ils auront cependant en commun d’être:

– les lieux dans lesquels les orientations diocésaines seront accueillies et réfléchies en vue de leur mise en œuvre sur le terrain.

– l’espace d’élaboration d’orientations com­munes au bénéfice d’une vie ecclésiale dynamique.

– un espace de proposition de formations appropriées pour aider les acteurs de terrain à remplir leur mission.

– le lieu à partir duquel se fera la répartition des prêtres et d’un certain nombre d’autres acteurs pastoraux au mieux des intérêts de chaque ensemble paroissial et toute autre mission dont les réalités à venir feront émerger la nécessité. C’est probablement là aussi que nous pourrons vérifier de quelle manière nous prenons en compte les priorités que nous nous sommes données dans notre projet diocésain : les jeunes, la solidarité, la formation, la communication.

Il est clair que tout cela aura des incidences importantes sur la vie de notre Église diocésaine, sur la définition de la mission de cha­cun, sur les manières de travailler et de s’organiser.

B. De nouvelles manières de travailler ensemble

Si on se situait uniquement en termes de gestion on pourrait constater qu’un certain nombre des « ensembles paroissiaux » sont auto-suffisants (c’est le cas en particulier de « paroisses » en ville) et que, d’autres ne le sont pas et ont besoin d’être épaulés par d’autres pour subsister. Mais dans l’Église on ne se situe pas seulement en termes de gestion. On n’est pas une communauté d’Église, si on est refermé sur soi-même. Il n’y a de communauté d’Église qu’ouverte au-delà d’elle-même vers d’autres communautés d’Eglises. Ce principe fondamental de vie ecclésiale appelle les « ensembles paroissiaux » à penser et à mettre en œuvre des collaborations concrètes entre eux (un exemple actuel de ces collaborations : tout ce qui concerne la préparation aux sacrements). Dans bien des cas, cette collaboration est une nécessité pour faire face aux besoins pastoraux. Elle offre également une autre dimension à nos rassemblements et à nos célébrations. Mais c’est aussi la qualité ecclésiale de nos « ensembles paroissiaux » qui se mesure et se mesurera à leur volonté et à leur capacité de la pratiquer entre eux.

TROIS QUESTIONS AU MOINS VIENNENT IMMÉDIATEMENT A L’ESPRIT

  1. Pourquoi changer maintenant et de manière aussi conséquente ?

On aurait pu se contenter de réaménager un peu les dispositions territoriales actuelles et poursuivre, comme on fait jusqu’à présent.

Pour tenter de répondre à cette question, j’aimerais vous partager trois convictions qui m’habitent :

  • Pour confirmer des orientations prises et anticiper des orientations à prendre, il est important de savoir quelquefois ne pas se contenter d’aménager, mais de renouveler en profondeur. A l’occasion des changements auxquels nous allons nous préparer ensemble en 2005-2006, nous serons amenés à
    • prendre encore plus la mesure du rôle des laïcs dans la mise en œuvre du « vivre, croire, célébrer, annoncer » des ensembles paroissiaux, de leurs besoins et des moyens de formation et d’accompagnement à se donner pour y répondre.
    • reprendre conscience de la mission du prêtre dans cette nouvelle figure d’Église, de son articulation avec celle des chrétiens engagés dans l’animation des communautés, de son lien avec les communautés elles-mêmes. Pour les prêtres ce sera une chance, s’ils acceptent de se dire qu’on gagne toujours à trouver un nouveau souffle pour son ministère et s’ils se laissent dans cette aventure conduire par l’Esprit Saint. Pour les laïcs, ce sera la chance de se reposer la question du besoin qu’ils ont du prêtre dans l’exercice de leur mission de baptisé et de pouvoir le dire aux prêtres.
    • relire le sens du diaconat et sa richesse pour notre Église diocésaine. Dans la dynamique de cette nouvelle manière de faire Église, nous pourrons regarder à frais nouveaux, comme nous y invitait déjà le Comité Diocésain du Diaconat (Lettre du 8 décembre 2000), «les réalités où l’Evangile n’est pas annoncé et l’Église peu présente» et susciter des réponses à ces manques.
    • nous reposer la question de la présence de la vie consacrée, apostolique et contemplative, son rôle, son mode de présence dans le tissu ecclésial.
    • nous remettre en face de la nécessité de rassemblements eucharistiques et de la manière dont nous pouvons les inscrire comme sommet et source de notre vie d’Église dans ses dimensions locales.
    • redécouvrir l’importance d’autres rassemblements communautaires en équipe, dans des mouvements, dans des groupes spirituels, non pas comme alternative aux collaborations et aux coordinations territoriales mais comme compléments et enrichissements de celles-ci. Il y a une fécondité mutuelle à déployer entre les ensembles paroissiaux et les mouvements d’apostolat. Leur articulation ne peut que rendre l’Église diocésaine plus vivante.
  • Il ne faut pas manquer le temps favorable où l’on peut encore faire des choix non pas par pure nécessité mais dans une perspective constructive.

Ce qu’on sera obligé de faire un jour sous l’effet de la crise, pourquoi ne pas le faire dès maintenant dans la perspective d’un projet ecclésial. C’est beaucoup plus dynamique et porteur d’espérance.

  • L’Église est par définition toujours en mouvement parce qu’elle est conduite par l’Esprit Saint. Ne nous dérobons pas à ses poussées.
  1. Comment honorer des missions qui étaient remplies par les doyennés et qui ne pourront plus l’être par des espaces de coordination aussi vastes ?

Le moment est peut-être venu de nous redire ce qui est essentiel et prioritaire pour « faire Église ». A tous les niveaux (ensembles paroissiaux, collaboration entre ces ensembles, espace de coordination), il y a une foule d’attentes et de demandes qu’on ne peut plus satisfaire, d’autres qu’il faut mieux satisfaire. N’essayons pas de reproduire dans ces nouveaux espaces ce qui se faisait dans les doyennés, mais profitons de leur mise en place pour faire des projets qui nourrissent notre vie ecclésiale. Il y a sans doute à se redire précisément ce qu’on peut et ce qu’on doit assurer comme service de la mission à chacun de ces niveaux, en reconnaissant humblement nos limites et nos incapacités.

  1. Quel bénéfice attendre d’espaces aussi grands ?

Ils obligent à inventer de nouveaux modes de présence et de fonctionnement, sans pour autant renier les réalités antérieures. Il faudra aménager le mode de présence des prêtres sur le territoire, renforcer une proposition d’accompagnement des laïcs en charge ecclésiale, amplifier un programme de formation adéquat à leur besoin. Au sein de ces espaces pourra aussi être favorisé le soutien mutuel entre des réalités qui n’ont pas nécessairement les mêmes possibilités et le même dynamisme (collaboration entre ensembles paroissiaux).

D’autres questions surgiront. Cette lettre veut les susciter. Nous essaierons d’y répondre ensemble au long de cette année.

 

II. « N’AYONS PAS PEUR »

Face à des changements – même si, permettez-moi de le répéter, ils s’inscrivent dans la continuité de nos choix antérieurs nous en sommes tous à évaluer ce que cela va bousculer dans nos vies. C’est légitime! Mais j’aimerais que nous nous sentions aussi tous invités à regarder sur quoi nous pouvons nous appuyer pour envisager une telle aventure et ce qu’elle apportera de renouvellement dans nos vies et nos engagements.

Les prêtres

Nous prêtres, même si nous acquiesçons intellectuellement à l’idée de la coresponsabilité avec les laïcs, sommes-nous portés spirituellement par la conviction que nous sommes au service du déploiement de la vocation des baptisés ? Si cela est clair pour nous, notre ministère sera bien plus un ministère d’accompagnement et de soutien que d’organisation et de gestion.

Le pasteur connaît ses brebis par leur nom, il en est proche, il marche à leur côté. Si le quotidien de la vie des communautés repose de plus en plus sur des laïcs, cela rendra d’autant plus urgente la disponibilité du prêtre pour être à leur côté dans un ministère de conseil et de discernement, de soutien et d’éclairage. Chacun aura à se mettre de tout cœur au service de ces hommes et de ces femmes pour qu’ils tiennent bon dans leur mission. Chacun aura à se donner les moyens pour être à la hauteur de cette mission qui n’est autre que celle confiée par le Christ à Pierre, et à travers lui à tous les autres disciples : «Pais mes agneaux, pais mes brebis» (Jean 21, 15- 18).

Le prêtre a pour mission, dans la continuité de cet accompagnement, de conduire le troupeau vers l’Eucharistie, en « s’unissant à l’intention et à la charité du Christ » (Presbyterorum Ordinis § 13).

Dans cette nouvelle configuration, le don de l’Eucharistie, fruit de l’intention et de la charité du Christ, devra rester acquis aux ensembles paroissiaux, à des rythmes significatifs, comme point d’aboutissement d’un cheminement de foi, d’espérance et d’amour, comme source constante de renouvellement. Il est de la fécondité spirituelle de l’accompagnement de conduire à l’Eucharistie. Mais il dépend de la qualité spirituelle de notre vie et de notre ministère presbytéral que celui-ci soit fécond. Une des conséquences du changement annoncé ne devrait-elle pas être que nous remettions avec confiance notre ministère entre les mains de l’Église à laquelle il appartient ? Il n’y a pas lieu de nous inquiéter d’être dépossédés de quelque pouvoir que ce soit. Les brebis ont soif de recevoir ; puissions-nous être assez remplis de «la charité» du Christ pour être là, pour donner d’une mesure abondante.

Les manières de travailler induites par ces nouveaux espaces de coordination appellent plus que jamais la fraternité entre les prêtres, leur soutien mutuel, leur volonté de prendre en charge ensemble la mission, sur un territoire et au plan du diocèse.

Les diacres

Dans cette nouvelle figure ecclésiale, le ministère diaconal trouve aussi un surcroît de sens. Si les diacres sont aux avant-postes de la charité, s’ils sont relais du Christ serviteur, il est précieux qu’ils ne soient pas engagés comme des individualités côte à côte, mais dans un esprit collégial. Dans un grand espace de coordination leur présence et leur solidarité pourront donner une visibilité plus forte et un dynamisme renouvelé à la charité de l’Église.

Les communautés religieuses

Les communautés religieuses ont, elles aussi, un grand rôle à jouer dans la proximité de la vie chrétienne, comme point d’appui de l’accompagnement de tous ceux qui sont en attente et comme pôle d’accueil et de rassemblement, pour les jeunes en particulier.

Les animateurs laïcs en pastorale

Les missions territoriales des ALP prendront également une autre tournure. Ce qu’on peut souligner comme extrêmement positif est que leur recrutement et leur mission seront à penser dans un esprit de solidarité entre ensembles dont les uns sont plus défavorisés. On peut de ce fait espérer aussi un effet d’entraînement pour l’appel de nouveaux animateurs laïcs.

Les chrétiens engagés

Le partage qui a eu lieu le 5 mars 2005 entre acteurs pastoraux a permis de mesurer combien il était important pour les laïcs appelés à des tâches ecclésiales de découvrir que cet appel n’était pas lié à la nécessité de combler des vides mais qu’il était une invitation à apporter le meilleur de soi-même au service d’une Église à faire.

La charge de cette Église à faire, au jour le jour, là où les hommes vivent, reposera de plus en plus sur des baptisés, délégués par la communauté et envoyés par l’évêque. Il en est déjà ainsi en bien des endroits de notre diocèse. On note que parfois le renouvellement des équipes pastorales est difficile, parce qu’aux appels de l’Église il y a peu de réponses.

Un enjeu des années à venir sera donc aussi d’approfondir dans les communautés chrétiennes cette spiritualité du service qui s’enracine dans le témoignage du Christ, venu non pas pour « être servi », mais pour « serviteur » (Matthieu, 20, 28), lui qui n’a pas hésité à se mettre à genoux devant ses disciples pour leur laver les pieds, lui qui surtout a été jusqu’à l’extrême du service en donnant sa vie pour nous. L’appel n’est pas de rendre service, mais de servir. Nous sommes tous appelés. Mais nous avons aussi à aider les autres à découvrir qu’ils sont eux aussi appelés et qu’ils ont en eux des trésors à partager avec leurs frères.

Les engagements «transversaux»

Tous ne sont pas engagés dans l’animation des ensembles paroissiaux. La mission des baptisés est d’être témoins du Christ dans le monde des hommes. Il y a beaucoup de manières de l’être et il y a aussi beaucoup de lieux ecclésiaux en dehors du lieu paroissial. Tous sont invités à faire leur la démarche que nous voulons initier. L’Église doit pouvoir compter en particulier sur les équipes d’Action Catholique, les groupes spirituels, les mouvements éducatifs, les équipes de bénévoles des services ecclésiaux, chaque réalité ayant sa richesse propre, pour être proposants de la foi, témoins de l’espérance du Ressuscité au cœur du monde. Pas plus que les ensembles paroissiaux ils ne seront ecclésiaux s’ils restent repliés sur eux-mêmes, sur l’entretien de leurs acquis. En revanche ils le seront pleinement si leurs membres sont au service de cet Evangile dont le monde a tant besoin. Pour eux aussi la réflexion s’impose sur la manière dont ils conçoivent la présence du ministère ordonné auprès des équipes et des groupes: accompagnement n’est pas fusion avec ceux qui’ sont accompagnés ; accompagnement ne signifie pas accaparement par ceux qui sont accompagnés.

 

III. QU’AVONS-NOUS À FAIRE DANS L’IMMÉDIAT?

L’immédiat c’est l’année 2005-2006, donc maintenant. Au cours de cette année je vous invite à entrer dans une démarche

  1. Se parler et en parler; comprendre et faire comprendre.

Il faut bien évidemment prendre connaissance du projet territorial qui est sorti de la réflexion d’un certain nombre d’acteurs pastoraux. Mais je vous invite du plus profond de moi-même à ne pas vous obnubiler sur ce projet. Ce ne sont pas des circonscriptions électorales. Il y aura probablement encore un certain nombre de précisions avant la mise en œuvre. Il vous est donc aussi possible de faire des remarques à ce sujet.

Mais bien plus déterminantes sont la compréhension et l’appropriation des enjeux de ce changement. Nous l’avons dit, il y aura des répercussions sur la manière de vivre certains de nos engagements d’Église. Mais il y aura encore plus profondément, pour chacun, un renouvellement de l’alliance baptismale avec son Église, l’accueil des nouveaux appels qui sont adressés par l’Esprit Saint et sur lesquels se fonde la vie à venir de cette Église. Tout ceci demande à être perçu, compris, assimilé, non pas dans l’angoisse, mais dans la confiance. Et à partir de là il est important que s’écrive un projet pastoral qui poursuivra la mise en œuvre de nos orientations diocésaines:

  • Pour une Église qui soit clairement l’affaire de tous les baptisés;
  • Pour une Église où le ministère des prêtres ait toute sa place;
  • Pour une Église qui déploie la diversité des ministères et des charismes;
  • Pour une Église qui soit proche de tous;
  • Pour une Église où la vie l’emporte sur les structures;

et devra les inscrire clairement dans les nouveaux fonctionnements que nous avons prévus. Dans l’écriture de ce projet, nous ne perdrons pas de vue non plus les priorités qui sont les nôtres.

Il faut donc que dans tous les lieux où les chrétiens se rencontrent, on parle de ces nouvelles perspectives, non pas comme d’une catastrophe qui nous tombe dessus, mais comme d’une occasion providentielle, d’un nouvel élan. Il est bon que nous soyons conscients des difficultés qui accompagneront notre route. Qu’elles ne soient pas cependant un frein aux sollicitations de l’Esprit Saint.

Beaucoup appréhendent l’avenir, se demandant vers quoi on va. Redisons-le encore: on va vers une Église qui restera proche à travers les chrétiens engagés dans les équipes pastorales, comme relais, comme permanents ou bénévoles. Il faudra se soucier qu’ils puissent se former, qu’ils soient soutenus et accompagnés: on va vers une Église où les prêtres seront moins nombreux, mais on peut le souhaiter, présents par leur ministère d’accompagnement et de rassemblement. On va vers une Église riche de la diversité de ses communautés. On va vers une Église où il faudra sans cesse accepter d’inventer de nouvelles manières de vivre, de croire, de célébrer, d’annoncer.

Ceux qui sont davantage engagés dans la vie de l’Église comprennent déjà cela. Cette lettre voudrait donner quelques repères pour la route. Ayons le souci de nous entraider à l’accueillir et à la faire nôtre.

Notre première tâche consistera à prendre en compte dans tous les lieux d’Église, trois points:

– La confirmation des ensembles paroissiaux et le renforcement des équipes pastorales et des équipes d’animation paroissiales;

– La réflexion sur des collaborations diverses à envisager entre ensembles paroissiaux;

– L’appropriation des nouveaux territoires dans lesquels chaque ensemble paroissial aura sa place;

et à en mesurer les conséquences pour chacun, pour chaque groupe, pour chaque entité. Ceci devrait nous conduire jusqu’à Noël.

  1. Mettre en œuvre

Viendra ensuite une première phase de mise en œuvre par un travail d’invitation et de rencontres des partenaires sur la base des nouveaux territoires : Equipes pastorales, Equipes d’animation paroissiale… Ce sera le premier temps de l’apprentissage d’un travail commun, de méthodes nouvelles et de la définition d’objectifs au sein de ces coordinations. Il est important, dans cette perspective, que soient nommés pour janvier 2006 les responsables des espaces de coordination. C’est eux qui auront à mener ce travail.

  1. Célébrer

Je vous invite enfin à nous retrouver tous le dimanche 25 juin, jour de la fête diocésaine, pour recueillir les fruits de notre démarche et pour célébrer notre joie d’être ensemble l’Église du Christ.

Mais qu’une chose soit bien claire : même si nous nous donnons un calendrier, la démarche ne sera pas achevée à la fin de cette année. Elle ne fait au contraire que commencer, car devant nous il y a toujours l’Église à construire dans les réalités de notre temps.

Frères chrétiens, prêtres, diacres, consacrés, laïcs, je vous invite à une commune aventure ou, si vous le voulez, pour rester dans le ton des JMJ de Cologne et nous rappeler ainsi que les jeunes doivent être au cœur de notre démarche, à une « marche à l’étoile ». Nous le savons, elle mène vers le Christ.

Bien fraternellement.

Le 4 octobre 2005, en la fête de saint François d’Assise.

+ Mgr Marc STENGER, Evêque de Troyes

 

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