Bonjour Père Armand,

  • En ce début d’année que voulez-vous dire aux paroissiens de Chaource ?

Je voudrais adresser une salutation à chacun où qu’il se trouve et dans sa situation de vie.

« BONNE ANNÉE PASTORALE missionnaire, et que chacun soit un témoin vivant du Christ sur sa paroisse ! »

  • Rien n’est dit officiellement, nous savons que vous êtes là depuis 6 ans ; mais il y a des rumeurs persistantes quant à votre prochain départ. Qu’en est-il réellement ?

Un proverbe africain dit : « Quand on voit le front d’un étranger, on s’attend tôt ou tard un jour à voir sa nuque ». J’étais venu dans le cadre d’une mission « Fidei Donum » : « Don de la Foi », convention de 3 ans, renouvelable une fois (2014-2020). Je retournerai donc à la fin de cette année pastorale dans mon diocèse d’origine et  m’en remettrai à mon évêque de Korhogo. (Nord de la Côte d’Ivoire)

  • Que retenez-vous ces six ans passés avec nous?

J’ai découvert une autre culture que la mienne, une autre mentalité, une autre facette de l’Eglise universelle. Des expériences faites de hauts et de bas, ce qui fait d’ailleurs  un équilibre. Je retiens juste ce qui m’a aidé à avancer.

  • Qu’est-ce que ces expériences vont vous apporter ?

Mon diocèse de Korhogo n’est même pas cinquantenaire et vous êtes une vieille chrétienté. Il est évident que les « vieilles marmites (casseroles) font de bonnes sauces».  En tant que prêtre, j’ai découvert une autre collaboration avec les fidèles dans l’exercice de  leur foi. Les églises de France en disent long sur l’histoire de la foi. J’ai acquis ici une expérience dont je pourrai faire référence une fois chez moi.

Toute l’expérience acquise ici fait partie intégrante de ma formation humaine.

ET APRES

  • Qu’allez-vous devenir après votre départ ?

Prêtre  je le suis pour toute la vie et je m’en remets à mon évêque de Korhogo qui m’affectera certainement sur une paroisse .Je  saurai avant de partir d’ici où je continuerai mon ministère sacerdotal.

  • Pouvez-vous nous expliquer la réalité d’une paroisse dans votre diocèse ?

Nos paroisses sont pauvres matériellement et financièrement, mais très riches humainement dans la  Foi et l’engagement .Les prêtres ont un statut différent d’ici. Ils restent encore un élément de référence en tout ce qui concerne la vie de l’homme, toute tendance religieuse et classe sociale confondues. Le lien des chrétiens à leur paroisse reste très fort et visible. En dehors des murs de la paroisse, la vie ecclésiale des fidèles continue au quartier, au village dans des cellules  vivantes (CEB) : communautés ecclésiales de base. Les chrétiens d’une même paroisse se retrouvent au cours de la semaine et discutent de la réalité qui les environne, le tout à la lumière de l’Évangile.

  • En quoi peut consister l’aide qu’on pourrait apporter à une paroisse pauvre chez toi?

La pauvreté à laquelle  je fais allusion  n’est pas criarde sur toutes les paroisses de mon pays. Je parle bien des paroisses rurales de mon diocèse où j’aime travailler. Ce sont des villages pauvres, et je vous explique comment j’essaie chaque année de venir en aide à quelques uns. En les dotant par exemple de vêtements liturgique : (chasubles), de vases sacrés : (ciboire, calice, patène…) et surtout de livres liturgiques : lectionnaire du dimanche et de semaine, lectionnaire sanctoral, missel romain, et par exemple : les coffrets de la lecture de la Passion, dont j’essaie de doter toutes les trente paroisses de mon diocèse. Sachez que sur trente coffrets souhaités, j’en ai déjà obtenu treize avec l’aide de certains anonymes.

  • Est-ce que votre présence ici vous a permis de mener des actions plus sociables ?

Oui, bien entendu! Ma présence ici m’a permis de beaucoup avancer dans un projet en faveur de la femme, initié quelques temps avant que je ne vienne en France. Nous travaillons sur un projet pour l’autonomie financière de la femme.

Nous avons pu construire une porcherie et mettre en route l’exploitation de champs communautaires : riz, maïs, arachide (cacahuètes). Nous construisons en ce moment un foyer pour accueillir les jeunes filles qui entrent au collège. Ce foyer se veut être une structure d’étude dans un environnement serein et sécurisé pour de bonnes études. Ce projet est donc orienté vers la gente féminine, qui reste le maillon faible de la société chez moi.

Nous avons obtenu du ministère de l’intérieur de mon pays, le récépissé qui indique, que cette association des femmes que nous encadrons, est une association à but non lucratif.

Elle porte le nom : « wo woyessigui » en langue sénoufo, et qui signifie : « ayons de l’attention les uns pour les autres ».

Il reste encore des travaux à finaliser mais nous sommes sur la bonne voie.

Je profite pour dire ma grande reconnaissance à tous ces amis, tous ceux et celles qui ont contribué à la réalisation de ce projet, spécialement au  diocèse de Troyes à travers l’économat diocésain. Dans le cadre du partenariat entre les deux diocèses, l’économat a toujours endossé les chèques reçus dans le cadre du projet et a effectué le transfert de fond à mon diocèse d’origine au profit de l’association des femmes.

  • Nous reverrons nous un jour ?

C’est possible là-bas ou ici. Le monde est devenu un grand village planétaire. Il y a maintenant les réseaux sociaux et l’Afrique n’est pas inaccessible; je serai donc heureux de vous y accueillir ou venir à vous … Des liens se sont tissés et cela ne disparaît pas comme ça.

                                                         UN DERNIER MOT

Oui, un dernier mot par rapport à cette interview, mais je suis encore là et nous avons encore  beaucoup de travail à terminer ensemble.

Merci au Seigneur de m’avoir permis d’accueillir une autre expérience dans ma vie de prêtre en venant ici . Merci au diocèse, à Monseigneur Marc  Stenger, à mes   confrères prêtres et diacres, à ceux qui m’ont offert leur amitié ici, sans oublier mes paroissiens avec qui j’ai vécu un quotidien inoubliable.

Ils resteront gravés dans mon cœur pour toujours. Retenons toujours le positif pour avancer.